Un hiver sans élan qui n’est jamais vraiment monté dans les tours, très contrasté selon l’altitude. La production de neige commença efficacement mi-novembre, la même perturbation qui amenait le froid blanchit la montagne jusqu’à 1000 m, les premiers sportifs testaient les pistes artificielles de Zinal le 21, bien tard au regard d’autres années. Début décembre des températures hivernales et beaucoup de travail permirent d’ouvrir les pistes artificielles au public, mais rien à faire avec le peu de neige naturelle en place, nous voyions arriver Noël en nous demandant où nous allions mettre les skieurs. Quand, miracle, une grosse perturbation avec d’abondantes précipitations s’annonça, mais accompagnées du fameux “redoux de Noël” que les chiffres de cette saison viennent encore confirmer. 70 cm en trois jours à 2500 m, une pluie qui emporta toute blancheur sous 2000 m, et la gamme des neiges lourdes à détrempée entre-deux.



L’épisode des 23 et 24 décembre fut le plus remarquable de la saison, la nouvelle neige lourde posée sur une vieille neige fortement cristallisée déclencha des avalanches sur toutes les pentes connues. Une fois le minage terminé il n’y avait plus rien à miner autour des stations, il ne restait que quelques pentes moyennes dangereuses en haute montagne, mais comme on ne pouvait pas skier sous 2000m et que le manteau restait mince, l’arrière pays comme ils disent resta peu fréquenté. Nous avons accueilli les clients des stations de moyenne altitude ravagées par les pluies, tous les records de fréquentation pour des vacances de fin d’année sont tombés, le nombre d’accidents suivit la courbe, occupant les patrouilleurs à d’autres tâches que la gestion de la neige. Il a fait beau et chaud, une petite couche est venue gommer les traces les 9 et 10 janvier à la fin des vacances. D’autres petits apports du 15 au 19 maintinrent le manteau, comme nous étions sur une bonne base depuis la grande purge de Noël, ces apports restèrent faciles à gérer. Le 27, le drone prenait une photosphère du vallon en amont du Chiesso.





Puis plus rien, ce fut le février le plus sec de l’histoire, heureusement les températures ne sont pas exagérément montées. Nos efforts pour ouvrir les retours en stations furent disproportionnés, la piste noire de l’Aigle resta ouverte au public du 4 au 19 février, celle du Chamois vers Grimentz… huit jours. Certaines pistes naturelles passèrent juste le mois, la Coupe du Monde et les Gouilles frôlèrent le hors-jeu et on prenait Barthélémy au péril de ses skis. Quand on annonça enfin un changement de temps la deuxième semaine de mars, je dédiais deux articles et un profil à l’épisode. Encore une fois les nouvelles neiges posées sur un vieux substrat se déclenchèrent facilement et partout, les minages complétèrent le travail autour des stations, la nature resta piégeuse assez longtemps. Une météo agréable permit de profiter de la montagne une bonne semaine avant un belle série de perturbations, il est tombé 179 cm à 2500m en mars, mais jamais assez pour envisager la réouverture des retours en stations, les pistes à Sorebois restèrent ensuite parfaites jusqu’à fin avril et au-delà. La plus haute couche fut mesurée le 16 avril au matin, dernier jours d’ouverture de la saison, avec 164 cm. Nous ne nous sommes pas découverts d’un fil en avril, le bilan final de 578 cm de cumul au 30 place l’hiver 2023 au-dessus de la moyenne, principalement grâce aux apports des deux derniers mois. Je note deux incursions de poussières du Sahara, la première au 24 février n’a fait que troubler l’atmosphère, celle du 30 mars a laissé une belle strate brune dans le manteau. En station à 1700 m la couche n’a dépassé les 30 cm que le 15 mars avec un éphémère 36 cm, pistes de ski de fond et patinoire ont vécu une petite saison, heureusement la piste de luge du SwissPeak a été enneigée artificiellement pour la première fois. Nous avons maintenu des pistes ouverte pour les sportifs jusqu’au 14 mai, je rédige ces conclusions le 15, l’expérience semble bonne. Les températures sont restées fraîches et les précipitations abondantes, malgré ces apports le manteau neigeux diminue rapidement, le printemps s’impose doucement mais fermement. Lien vers le rapport climatologique hiver 2023 de MétéoSuisse – Lien vers la feuille de calcul incluant les mesures de tout l’hiver – Lien vers l’album public Hiver 2023

Quelques réflexions très personnelles, c’est mon blog après tout; d’abord on nous annonça une terrible crise énergétique due à de multiples facteurs dont la guerre à l’est. J’imaginais des économies drastiques dans les stations, ce que les médias et spécialistes annonçaient à grands discours. Il ne s’est rien passé, les mesures d’économie sont restées minimes, nous n’avons jamais manqué d’énergie malgré l’augmentation des coûts, les clients étaient nombreux et il fallait les satisfaire. Cette crise des mots a énormément enrichi les fournisseurs d’énergie au détriment de tous, riches et pauvres, un détail pour les premiers une catastrophe pour les autres car tous les biens de consommation ont suivi. Je pense qu’à l’avenir, au moins jusqu’aux centrales à fusion, il faudra consommer moins pour offrir de belles glissades à nos hôtes. Les retours en stations par exemple devraient attendre que les conditions soient propices à leur ouverture, plutôt que de brûler des quantités invraisemblables de courant et de mazout pour de piètres résultats. Si les scientifiques et les statistiques montrent que l’hiver commence à 2000 mètres, concentrons-nous sur ces altitudes tout en gardant la possibilité de skier plus bas quand la nature le permet. Mon travail se situe entre la donne naturelle et l’industrie du tourisme, je constate ainsi la chance insolente de notre région qui investit à la limite du surendettement; nous avons reçu 243 cm de neige l’hiver 2011, pareille situation peut se reproduire, ne l’oublions pas dans notre course en avant.

Je mets en exergue cette photo du futur Espace Weisshorn qui sera en fonction l’hiver prochain. Un nouveau restaurant qui changera toute la dynamique de la station, et devrait drainer une nombreuse clientèle hiver comme été. Rendez-vous en novembre…